Le stress touche aussi bien les enfants que les adultes. C'est un état de tension à la fois physique et psychologique qui est souvent dû à une façon inadaptée de gérer la pression (école, sport, travail ou quotidien...) pendant une période relativement longue.
Beaucoup d’enfants développent des symptômes réactionnels aux pressions sociétales, scolaires et familiales.
Les facteurs de stress sont nombreux – on les trouve dans:
A terme, s’il n’est pas aidé, l’enfant développe un stress que l’on nomme syndrome général d’adaptation, découvert par le Canadien Hans Selye. Sans cesse, on lui demande de s’adapter aux nouvelles techniques, aux nouvelles demandes, ce qui exige de développer une énergie physique et psychique considérable. Au bout du parcours du combattant où il n’y a pas de place pour le repos, ni pour l’échec, certains enfants s’enfoncent dans la dépression, d’autres développent une maladie.
Le corps dit STOP, enfin, à cette spirale d’exigences infernales.
Pour nous parents, comment faire vis à vis de nos enfants?
Quelques repères proposées par Anne Jeger:
Interview pour le journal Diagonal – Traverser la crise
Le stress chez les enfants est-il une problématique "légitime" ou la transposition d'un thème d'actualité dans le domaine de l'enfance? Est-ce un phénomène nouveau?
"Je ne pense pas que ce soit un phénomène nouveau. Toutefois le stress est majoré depuis quelques années à cause de la pression sociétale et professionnelle que subissent les adultes qui projettent (malgré eux) leur stress et leurs angoisses sur leurs enfants. Idem à l’école où ils sont tenus de suivre un programme et d’arriver au bout quels que soit les moyens et le temps mis à disposition."
Le risque de stress est-il plus élevé chez les enfants ou chez les ados? Il y a-t-il des groupes d'âge ou des populations à risque?
"Il peut être aussi élevé chez les enfants que chez les ados - tout va dépendre du contexte socio-économique dans lequel grandit l’enfant/l’adolescent, son développement psycho-affectif et émotionnel, les épisodes traumatiques de sa vie (séparations précoces, deuils, maltraitance), les antécédents de stress, la structure de sa personnalité, sa capacité à tolérer le stress, ses ressources internes et externes (familles, réseaux d’amis, etc). Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte."
Quelle est l'influence des écrans?
"On sait aujourd’hui que les écrans ont un impact non négligeable sur les enfants, leur cerveau, et donc leurs comportements. J’observe que l’addiction aux écrans provoque du stress. Car en état de manque l’ado cherche à trouver des solutions alternatives mais n’en trouvant pas il commence à stresser puis le stress tourne en angoisse et se traduit souvent par de l’agressivité face à ce qui fait obstacle : ses parents par exemple."
Les enfants disposent-ils de ressources intuitives pour la gestion de stress?
Leur seraient-elles plus facilement accessibles qu'aux adultes?
"Je ne le pense pas. Les enfants ont besoin qu’on leur apprenne à gérer leurs émotions et leur stress. Ce pourquoi il est inopportun de les laisser seuls face au stress qui devient pathologique s’il devient chronique."
Assiste-t-on à un développement croissant des pathologies (hyperactifs etc.);
à une croissance de la prescription de médicaments ?
"Oui en effet. Ce qu’on nomme l’hyperactivité est un trouble diagnostiqué. Derrière un comportement hyperactif (et non un trouble) on peut y déceler beaucoup de stress et des angoisses non gérées et non contrôlées. L’enfant est débordé. En effet, on assiste à une augmentation de la prescription de médicaments. Toutefois beaucoup de médecins et pédopsychiatres restent prudents."
Comment comprendre le langage de stress chez les enfants alors qu'ils ne peuvent pas verbaliser leur vécu aussi clairement que les adultes?
"Les enfants manifestent leur stress par les symptômes énoncés plus haut. D’aucun somatise beaucoup et développent des problèmes de peau par exemple, ont souvent mal au ventre ou à la tête. Il faut y être attentif et s’inquiéter devant tout comportement nouveau et exacerbé."
Est-ce que les situations de séparation de plus en plus fréquentes induisent du stress supplémentaire chez les enfants ?
"Sans aucun doute et même quand elles sont bien expliquées aux enfants, ceux-ci doivent faire face à de nouvelles donnes, gérer les changements sur les plans physique et émotionnel. Le stress est une réaction physiologique face à un danger/l’inconnu et nous permet de nous adapter. Toutefois, une séparation brutale, inattendue ou répétée provoque des blessures psychologiques profondes."
Quels autres évènements majeurs peuvent-ils être déclencheurs?
"Un décès, un déménagement, une agression, du harcèlement scolaire, des mauvais traitements, des abus, des disputes récurrentes à la maison entre ses parents, la pression scolaire, la pression parentale, etc."
Les parents s'inquiètent-ils trop (situation de l'enfant à l'école, sollicitations des professeurs)?
"Oui et non. Ils sont plus alertes car ils s’informent, ont besoin de comprendre les réactions de leurs enfants, interroge les professeurs. Les parents se sentent plus concernés qu’avant. Par contre, quand l’enfant est tout le temps questionné ou observé, et que les parents sollicitent régulièrement les enseignants, ils peuvent présenter, l’un ou l’autre, un trouble anxieux."
Est-ce qu'on observe une insuffisance généralisée de sommeil comme chez les adultes?
"Oui c’est prouvé aujourd’hui. Les adultes dorment moins qu’avant. Moins de sommeil provoque des irritations, des comportements agressifs et parfois violents. Moins de tolérance et plus de réactions vives envers les enfants."
Concernant la question du manque de sommeil généralisé, est-ce que le même constat s'impose chez les enfants comme pour les adultes?
"Oui de plus en plus. J’ai dans ma consultation des enfants et des adolescents stressés qui ont beaucoup de peine à s’endormir, car ils ne parviennent pas à se détendre ; ou qui se réveillent en pleine nuit et ont de la peine à se rendormir."
Qu’est-ce que le "syndrome général d'adaptation" ?
"Hans Selye, professeur et directeur de l’Institut Expérimental de Médecine et de Chirurgie au Canada, a introduit en 1950 le syndrome général d'adaptation qui se développe en trois phases : la phase d'alerte (mise en alerte de l’organisme avec réactions physiologiques), le stade de résistance (tentative d’adaptation au stress : réaction de combat, de fuite ou d’impuissance) et le stade d'épuisement (incapacité de récupérer et de s’adapter, effondrement, burn out). Le syndrome général d’adaptation est un exemple de la façon dont le stress provoque certaines pathologies. "
Que conseillez-vous aux enfants pour apprendre à gérer leurs émotions et leur stress ?
"Je recommande de pratiquer l'une de ces activités très bénéfiques :
Il s’agit surtout d’apprendre aux enfants à respirer, à se relaxer, et aussi à comprendre que nos pensées influencent nos émotions et nos sensations. Donc il est aussi nécessaire de faire un travail sur les pensées. Leur offrir un cadre de vie calme, être à l’écoute de ce qu’ils vivent : parler fait du bien, être rassuré diminue le stress, et partager des moments tranquilles sans enjeux."
Pour en savoir plus sur le sujet, Anne Jeger est l’auteure du livre « Regard d’une psychologue sur les enfants, la vie de famille et les épreuves du couple. » (A commander sur => lafamilyshop.ch) et chez Payot à Lausanne
Commentaires