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Préserver l'intimité de mon enfant

Prière de ne pas déranger

L’intimité permet à l’enfant de mieux se connaître et de se construire. D’où l’importance pour les parents, de la respecter dans toute sa dimension physique, psychique et émotionnelle.
Il y a des gestes qui dépassé un certain âge, entraînent une certaine confusion. Embrasser ses enfants sur la bouche ou se baigner avec eux, par exemple.

Il arrive parfois que les parents aident leurs enfants à prendre leur douche pour que ça aille plus vite ou pour éviter d'inonder la salle de bain, remarque Séverine Chapuis, formatrice et éducatrice en santé sexuelle à la Fondation PROFA. Idéalement, ils pourraient profiter de ces moments pour les motiver à se débrouiller seul·e·s dans le but de favoriser le processus d'autonomisation et l'acquisition de la pudeur.

Des habitudes, mais aussi des facteurs liés à la culture, à la religion, à l’origine sociale peuvent redéfinir la notion d’intimité.  Quand on vit dans un petit logement, que les enfants dorment dans la même chambre, la proximité physique est plus grande, constate Célia Sabot, doctorante en sociologie de l’enfance, à l’Université de Lausanne. Si jamais l’enfant manque d’intimité, il saura malgré tout la recréer ailleurs.

De l’enfance à l’adolescence, l’intimité fluctue, revêt plusieurs formes, mais on peut la résumer par tout ce qui est intérieur, secret, privé et personnel. Elle englobe non seulement l’aspect matériel – avoir un endroit à soi, ses jouets – et prend aussi en compte d’un territoire psychique propre.

Se détachant petit à petit de l’atmosphère un peu fusionnelle au sein de la famille, l’enfant va garder pour lui ses pensées, ses sentiments, tenir cachés quelques petits secrets. À travers l’intimité, les enfants prennent leurs distances et affirment leur personnalité, que cela plaise ou non aux parents. 

Dans ma bulle

Fermer la porte des toilettes ou celle de sa chambre, les parents doivent être attentifs aux messages. De la naissance de la pudeur à la revendication de son droit à la tranquillité, l’enfant puis l’adolescent exprime son ressenti, son droit de s’isoler du regard des autres.

L’intimité, c’est d’abord un sentiment de sécurité qu’aucune menace ne vient perturber, précise Mme Sabot. L’enfant peut l’éprouver dans sa chambre, mais aussi dans d’autres endroits, au bord d’une rivière ou dans le jardin de ses grands-parents.

Vivre ensemble n’oblige pas à tout partager, à tout connaître de l’autre. Les parents sans à priori adapteront leur attitude en fonction des réactions de l’enfant et se mettront à la bonne distance.

« Si vous respectez sa sphère privée, il sera plus libre d’exprimer ce qu’il aime ou pas, ce qui lui convient ou pas, souligne Véronique Schneiter, psychologue psychothérapeute au CTAS*, à Carouge. Rassuré et légitimé au lieu d’être dénigré dans ses sensations, il se fera mieux respecter et sera davantage en phase avec ses envies et ses désirs. »

Dans un monde où il est entouré d’adultes et pas seulement de ses parents, il est vital qu’il puisse s’appuyer sur une solide estime de soi et éviter ainsi de possibles situations d’emprise. Point de départ d’une émancipation progressive, l’intimité se réinvente à l’adolescence, période où l’on échappe au regard de la famille et où l’on se tourne vers ses pairs à qui l’on va se confier.

Là où il y a de la gêne

Sur des sujets délicats, il n’est pas toujours facile pour des parents mal à l’aise, de communiquer avec leur enfant. En matière de sexualité, on peut se sentir gêné de parler anatomie, parties intimes. Pourtant, c’est en nommant les choses qu’on les fait exister, qu’on les rend concrètes.

« La sexualité doit être abordée de façon positive et joyeuse, car c'est en étant fier·e de son corps qu’on prévient des abus sexuels, considère Mme Chapuis. Dans les cours que nous donnons, nous partons des questions des élèves. Sans les influencer ou les inciter, nous évoquons des valeurs de respect et de tolérance. »

La Fondation PROFA dispense des cours d’éducation sexuelle – appelés éducation à la vie et prévention des abus sexuels pour les plus jeunes – dans les écoles vaudoises de la 3P à la 11P. L’intimité d'un enfant est comme une propriété privée sur laquelle est planté un panneau "Défense d'entrer". Y pénétrer sans son accord est une atteinte à son intégrité physique ou psychique.

« Encourager les enfants à développer leur intimité émotionnelle leur sera aussi utile à l’âge adulte, observe Mme Schneiter. En couple, ils auront une vision plus claire de leurs limites, des concessions qu’ils sont prêts à faire ou pas. »

Ne pas s'ingérer dans ses relations, le laisser faire ses choix, se retenir de fouiller ses affaires ou son téléphone, mais rester vigilant et à l'écoute sont autant de comportements qui aident à mieux accompagner le besoin d’intimité de ses enfants et à ne pas en franchir les frontières.

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