La reprise scolaire est la frontière qui sépare deux mondes bien distincts. D’un côté, les vacances où tout est presque permis et de l’autre l’école – et aussi le bureau – où l’on doit se conformer à un rythme imposé. Cette ligne de démarcation, beaucoup de parents la voient comme le top départ d’une nouvelle année qu’il ne faut absolument pas rater. Pour cette raison, de plus en plus ont recours à des stages de prérentrée.
« Nos cours ont lieu deux semaines avant la reprise, explique Malika Lazreg, directrice de l’école Alphalif, à Lausanne. Ce genre de stage, de mise en jambes est extrêmement prisé actuellement. Durant cinq jours dans une ambiance studieuse, les élèves ont cours le matin et sont libres l’après-midi. La transition se fait en douceur et n’empiète que sur la toute fin des vacances. »
Le risque avec certains parents est de prévoir trop tôt à l’avance et de ne pas couper complètement avec l’école pendant la pause estivale. « Avant même de partir en vacances, il y a des parents déjà angoissés par la rentrée, remarque Nahum Frenck, pédiatre et thérapeute de famille, à Lausanne. Ils me demandent jusqu’où ils peuvent pousser leurs enfants à travailler en plein milieu de l’été. » Le succès des cahiers de vacances et autres camps de révisions illustre la préoccupation grandissante de ne pas oublier ce qui a été appris dans l’année. Faire preuve de trop d'empressement peut néanmoins créer du stress et nuire au climat familial dans une période synonyme de relâchement et de lâcher-prise.
Suite au confinement dû à la crise sanitaire, les familles se soucient du retard pris sur les programmes. Même si elles ont vu combien il était difficile de se substituer aux enseignants, elles ont tendance à ressortir les cahiers en vue de la rentrée prochaine.
« S’intéresser à son avenir, c’est normal, note M. Frenck. Par contre ce qui a changé aujourd’hui, c’est qu’on ne s’en fait plus seulement pour ceux qui planchent sur leurs examens de maturité mais aussi pour ceux qui passent de la 2P à la 3P! »
Dans un monde plus concurrentiel que jamais, les parents se sentent investis d’une mission. « Ils se considèrent responsables de la réussite de leur enfant, constate Mme Lazreg. Ils se rendent compte des choix d’orientation qui sont déterminants et qui arrivent très tôt dans la vie de l’élève. »
D’où une appréhension et la volonté de les armer face aux échéances qui les attendent. Contrairement aux enfants qui vivent au présent, les parents veulent anticiper, contrôler le cours des choses. Et quand cela ne se passe pas comme prévu, qu’être sur le dos de leur ado ne donne pas les résultats escomptés, c’est l’impuissance qui les gagne, le sentiment d’être de mauvais parents. Année après année, chaque rentrée scolaire s’accompagne d’enjeux toujours plus importants. Et si la bonne méthode consistait à faire confiance aux enfants et à leurs enseignants, de les laisser reprendre progressivement? Et à baisser ainsi la pression qui pèse sur les épaules des parents.
François Jeand’Heur
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