A mi-chemin entre la rééducation fonctionnelle et la psychologie, le psychomotricien aide le patient à retrouver ses capacités motrices, cognitives et relationnelles. Aurélie Voegeli Afouda, thérapeute en psychomotricité à Morges, répond aux questions de La Family sur le lien corps-esprit.
La Family — Comment définissez-vous la psychomotricité?
Aurélie Voegeli Afouda
On peut définir la psychomotricité comme la psychologie du corps. Quand quelque chose bloque entre le corps et l’esprit, elle met l’accent sur l’articulation du psychisme et du physique.
Quels genres de troubles relèvent de la psychomotricité?
C’est très large. Ça peut concerner des personnes qui ont des troubles de l’équilibre, du sommeil, qui n’arrivent pas à respirer ou à lâcher prise. Les enfants consultent également un cabinet de psychomotricité s’ils ont des difficultés de spatialisation, d’écriture, s’ils sont trop agités, désorganisés ou un peu trop rêveurs.
Ca s’adresse à beaucoup de gens de tous âges...
Qu’il s’agisse d’une personne âgée atteinte de la maladie d'Alzheimer ou d’un jeune en échec scolaire, la psychomotricité va les aider, les motiver à dépasser leurs difficultés physiques et à se sentir à l’aise dans leur corps.
Suivez-vous des enfants dyslexiques?
Oui. Les troubles dys ont à voir avec l’axe corporel et nous pouvons les atténuer. Mais en sachant que c’est souvent héréditaire et qu’on n’en guérit pas complètement, les parents ne doivent pas culpabiliser et se dire « Ah si j’avais su, j’aurais eu recours à la psychomotricité plus tôt. »
L’école fait-elle régulièrement appel à vos services?
Dans le primaire, lorsqu’un enfant a des problèmes d’apprentissage, les enseignants nous sollicitent plus facilement qu’un psychologue, d'une part parce que les symptômes s'expriment souvent par le corps et d'autre part parce que parfois, les parents ont moins d'à priori concernant le psychomotricien.
Que leur proposez-vous?
Nous leur recommandons un bilan psychomoteur sur quatre séances afin de découvrir l’origine du problème. On va partir de la demande, par exemple des troubles graphomoteurs ou de lecture qui sont la pointe émergée de l’iceberg et on va remonter la chaîne. En regardant la motricité globale de l’enfant, on a une vision plus large.
En quoi consiste le bilan psychomoteur?
Nous analysons comment l’enfant se situe selon trois axes. Tout d‘abord, sa relation à lui-même, comment il utilise son corps, s’il ose bouger, occuper l’espace ou s’il se met en retrait. Il y a sa relation à l’autre, est-ce qu’il se cache derrière ses parents, est-ce qu’il se déplace aisément ou reste-t-il figé si je lui fais une passe avec un ballon? Enfin, il y aussi sa relation à l’environnement physique, aux objets qui l’entourent.
Quelles conclusions tirez-vous de ce bilan?
Certains ont des défenses tactiles ou psychologiques. Nous relevons leurs forces, leurs faiblesses, leurs compétences, et à partir de là, on va planifier un traitement et obtenir rapidement des résultats.
A quoi ressemble un traitement?
Lors d’une séance, on peut se livrer à un combat d’épées si l’axe corporel est à renforcer. On peut aussi jouer à un jeu de rôle ou de société pour lui faire prendre conscience de ses émotions. L’enfant va décider ce qu’il préfère faire et c’est comme ça qu’il va intégrer certaines choses.
Comme quoi?
Il va se rendre compte que son corps est la limite entre le monde extérieur et intérieur, la porte d’entrée de ses émotions. Et qu’il faut laisser transparaître parfois ses sentiments et ne pas les laisser sortir à d’autres reprises. Il apprend à vivre avec son corps, à le percevoir et à l’investir d’un point de vue émotionnel.
D’une façon plus générale, les capacités psychomotrices doivent-elles être stimulées dans une société de la technologie?
Alors que leur développement passe par le corps, les enfants ne bougent plus assez aujourd’hui. Ils sont rivés à leur natel ou à leurs écrans de jeux vidéo ce qui réduit leur motricité fine.
Comment remédier à la situation?
Il faut éviter de les surstimuler, de les surcharger d’activités. Prendre du temps pour jouer, échanger avec eux est important. Tout comme leur faire faire du sport, mais aussi les laisser souffler pour qu’ils soient plus créatifs.
A voir, un petite vidéo sur la psychomotricité